BOYCOTTAGE D'UN LABORATOIRE : LES RISQUES
« Le boycotte commercial est un délit lourdement sanctionné comme vous le constaterez dans le réponse juridique de Maître RAMBERT de PARIS. Cette lettre représente une réponse spécifique à la question de la C.N.I.M.G. de CLAMART, au sujet des laboratoires pharmaceutiques et d'un éventuel boycotte .
Sur les forums , j'ai pu lire des réflexions concernant les journaux spécialisés ou non qui cautionnent par la publication d'encarts »publicitaires »répétés des informations peu élogieuses des CPAM à l' encontre des actions de la coordination et notamment les tarifications.
Certes, l' attitude de la presse à se faire porte-parole des CPAM et de ne pas respecter une neutralité déontologique peut surprendre. Toutefois un appel au boycotte de ces journaux , relève du même principe que celui étudié ci-après. Nous laisserons donc seuls juges nos confrères abonnés d'écrire à ces journaux pour leurs faire part de leur étonnement quant à leur prise de position dans ce conflit qui oppose les médecins généralistes et les caisses d'assurance maladie.
Objet : lettre de Maître RAMBERT BENOIT de PARIS
Date : Mer 24 avr 2002 2:38
De BENOIT RAMBERT AVOCAT À LA COUR 51, AVENUE MONTAIGNE - 75008 PARIS TÉL. 01 43 59 20 91 FAX 01 45 63 4669 PALAIS D 302 |
A Monsieur le Docteur Patrick LEROUX CODECOMED 28 rue Maurice Bouchery 59480 LA BASSEE
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Paris, le 17 avril 2002
NREF: CODECOMED
Monsieur le Président,
Vous m'avez interrogé sur l'action envisagée par votre association consistant à ce que ses membres excluent de leurs prescriptions les produits d'un laboratoire déterminé.
Une telle action serait illicite et exposerait tant ses initiateurs que ceux qui la mettraient en oeuvre à des sanctions qui peuvent être importantes.
L'article L 420-1 du Code de Commerce prohibe en effet toutes actions concertées, ententes expresses ou tacites et coalitions tendant notamment à limiter l'accès au marché d'une entreprise et/ou à répartir les marchés.
Ce texte est applicable à toute personne pouvant être considérée comme un acteur économique exerçant une activité sur le marché.
Dans sa décision N° 95-D-86 du 19 décembre 1995 relative à certaines pratiques relevées dans le secteur des prothèses articulaires, le Conseil de la Concurrence a jugé que l'activité professionnclle de soins médicaux constitue une activité de services entrant dans le champ d'application des textes réglementant la liberté effective de la concurrence et que " les médecins, pour ce qui est de leur comportement d'acteurs sur ce marché des soins, se trouvent dans la situation d'une entreprise... " .
L'on pourrait certes tenter d'opposer à l'application de l'article L 420-1 que les médecins ne sont euxmêmes dans aucune situation de concurrence avec un laboratoire pharmaceutique.
Mais le simple fait de fausser le jeu de la concurrence sur un marché, indépendamment des mobiles de l'action correspondante, est sanctiormable.
Le principe de la liberté de toute personne de s'approvisionner chez les commerçants (en l'espèce les laboratoires) de son choix ne me para:it pas de nature à rendre licite l'action envisagée dès lors que l'action de l'espèce relèverait non plus d'un libre choix mais d'une pratique concertée impliquant probablement la participation de plusieurs milliers de médecins,non justifiée par une critique objective et fondée des substances du laboratoires visé.
Les sanctions encourues dans le cas de mise oeuvre de l'action sur laquelle vous m'avez interrogé sont de deux ordres :
sur le plan pénal : l'article 420-6 du Code de Commerce expose à une peine d'emprisonnement d'un maximum de quatre ans et à une amende d'un montant maximum de 500 000 F, toutes personnes prenant une part personnelle et déterminante dans la conception, l'organisation ou la mise en oeuvre de l'une des pratiques visées notamment à l'article L 420-1 ;
sur le plan civil : le laboratoire visé par la pratique concertée peut saisir le Conseil de la Concurrence et solliciter l'indemnisation de son préjudice.
J'attire votre attention sur l'importance des sanctions pécuniaires habituellement prononcées par le Conseil de Concurrence.
S'agissant enfin bien évidemment de l'indemnisation du préjudice subi par le laboratoire, il pourrait engager la responsabilité de tous les membres de votre association ayant préconisé et/ou mis en oeuvre la pratique illicite.
Les montants en cause sont bien évidemment susceptibles d'être particulièrement importants compte tenu du nombre de membres de votre association.
Demeurant à votre disposition pour toute précision supplémentaire que vous pourriez souhaiter,
Je vous prie d'agréer, Monsieur le Président, l'assurance de mes sentiments les meilleurs et bien dévoués.
Benoit RAMBERT